GP de Canada 1981: Jacques Laffite magistral sous la pluie

27 septembre 1981, il y a 40 ans… Jacques Laffite au volant d'une Ligier JS17 remportait avec brio le Grand Prix du Canada. Une deuxième victoire pour la toute nouvelle équipe Talbot-Ligier-Matra, après le Grand Prix d'Autriche en août, qui laissait ouverte la voie vers un couronnement possible au championnat. Les qualifications n'auguraient pourtant rien de bon. Le temps était sec et les voitures chaussées de pneus Goodyear avaient pris l'avantage. La Ligier JS17 n°26 avec ses gommes Michelin n'avait pu faire mieux que le dixième temps. Mais le jour de la course, il en ira tout autrement.

Le dimanche en effet les orages se succèdent depuis le matin et au moment du départ la piste est détrempée. Mais dès le cinquième tour Jacques Laffite et sa JS17 remontent en quatrième position pour prendre le commandement au 13ème tour. Un commandement que le pilote français dans un de ses meilleurs jours ne lâchera pas. À l'arrivée, il devance John Watson sur sa Mc Laren à moteur Ford Cosworth et laisse loin derrière l'enfant du pays, Gilles Villeneuve, sur sa Ferrari.

Il se souvient : « J'ai gagné au Canada sous la pluie parce que j'avais des pneus Michelin, le moteur Matra qui avait beaucoup moins de chevaux à bas régime en couple que le Ford ou les turbos de l'époque, et une très bonne voiture. J'avais le bon compromis. Aux premières places, il n'y avait que des équipes en Michelin. »

Ajoutons à ce trio gagnant, un pilote brillant qui ne commet aucune erreur pendant deux heures sur une piste bosselée et inondée ! Jacques Laffite règle ainsi définitivement son compte à sa réputation de pilote réticent sous la pluie. « Cette réputation, je la trainais depuis 1975, dit-il en souriant. J'étais chez Williams et au Grand Prix d'Autriche on roulait sous un véritable déluge. J'ai décidé, contre les injonctions de Frank, d'arrêter au 21ème tour. J'étais quatorzième. C'était inutilement dangereux ! Frank Williams a fini par reconnaitre que j'avais raison mais ça m'a couté ma place chez Tyrell qui a rompu le contrat que je venais de signer pour l'année suivante. Ken a dit : je ne prends pas un pilote qui abandonne sous la pluie. Et je suis allé chez Ligier. Le destin ! » Ce jour-là sur l'île Notre-Dame Jacques Laffite prenait sa revanche et signait sa sixième victoire en Grand Prix.

Mais la saison 1981 ne verra pas le rêve des Bleus et de leur pilote fétiche se réaliser. En cause, le respect à la lettre du règlement du constructeur français en début de saison. A la différence de nombre d'équipes, en particulier celles qui ne bénéficiaient pas de la puissance d'un moteur turbo. Gérard Ducarouge et Michel Beaujon avait conçu une nouvelle JS17 pour le moteur Matra V12 modifié, en totale conformité avec le règlement qui imposait des jupes solides et une garde au sol de six centimètres, mesurée à l'arrêt. Après quatre Grand Prix sans résultats, Guy Ligier se résoudra à donner son feu vert. Les ingénieurs « interpréteront » le règlement en adoptant les suspensions hydropneumatiques de Citroën. A l'arrêt, la garde au sol restait bien de six centimètres, comme l'exigeait le règlement, mais en piste la voiture se plaquait au sol grâce au jeu des suspensions. Le résultat sera immédiat avec un premier podium au cinquième Grand Prix à Zolder pour Jacques Laffite et la jeune équipe Talbot-Ligier-Matra. Hélas cette décision arrivera un peu tard. Malgré deux victoires et plusieurs podiums en deuxième partie de saison, Ligier ne rattrapera jamais son retard. La saison 1981, la première de l'association des trois marques françaises, se soldera quelques petites semaines plus tard sur le circuit de Las Vegas par une quatrième place au championnat constructeur.